Les zoos en questions

Qu'est-ce qu'un zoo aujourd'hui ?
Panthère tachetée, zoo d'Ozoir-la-Ferrière, en août 2014

Aujourd’hui, en France, il existe plus de 200 zoos ou assimilés, détenant entre 60 000 et 100 000 animaux ; on en compte 1500 en Europe et plus de 10 000 dans le monde, parmi lesquels seulement 500 enregistrent leurs animaux dans des bases de données.

Qu’est ce qu’un zoo ?

Un zoo, un parc ou un jardin zoologique : quel que soit le nom qui lui est donné, c’est avant tout un endroit dans lequel sont enfermés des animaux, exotiques en majorité, dans un but commercial et de divertissement. Le zoo est un vestige de l’époque coloniale. Et seule l’espèce humaine enferme de la sorte toutes les autres espèces.

Face à la critique, les zoos ont depuis longtemps tenté de donner une image plus positive : passant d’un établissement détenant des animaux captifs à des fins mercantiles à un établissement œuvrant pour la sauvegarde des espèces et ayant un rôle culturel et pédagogique. Si, pour nombre de personnes, ce rôle semble être désormais une évidence, la réalité est toute autre.

Les zoos d’aujourd’hui ne sont-ils pas plus conformes aux besoins des animaux qu’hier ? N’est-ce pas un réel progrès ?

Il est indéniable que la majorité des zoos ont évolué. Mais cette évolution reste partielle et ne saurait faire oublier la raison d’être de ces établissements : enfermer des animaux, loin de leur biotope d’origine afin de divertir la foule et de gagner de l’argent.

L’existence même des zoos humains a été remise en cause au début du XXe siècle, non quant aux conditions d’hébergement des Inuits, des Cingalais ou des Malais, mais sur les bases d’une critique du bien-fondé d’une telle détention. Cette critique semble perdre de sa validité dès lors qu’elle s’applique à une autre espèce que la nôtre.

La grande évolution des zoos réside dans l’image qu’elle donne : l’impression de liberté est plus importante aujourd’hui pour les visiteurs que pour les animaux eux-mêmes. Fosses et cages ont laissé place aux îles, aux plexiglas, aux plantes en plastique : toute une mise en scène qui sert le public « client », et non les animaux « objets ».

L’espérance de vie des animaux n’est-elle pas plus élevée dans les zoos qu’à l’état sauvage ?

En moyenne la longévité des animaux n’a pas évolué au fil de l’évolution des zoos.

Nombre d’animaux meurent avant leur première année, car ils ne s’adaptent pas (enclos trop petits, stress, maladie, etc.). Selon l’International Zoo Yearbook, forum mondial d’informations sur le rôle des zoos, 17 % du stock total des animaux meurent chaque année dans les zoos.

De plus, ne confondons pas reproduction et naissance : la reproduction implique une natalité qui l’emporte sur la mortalité et une croissance de nouveaux individus jusqu’à l’âge de se reproduire. Mais la majorité des espèces captives n’atteignent pas cet âge, derrière leurs barreaux.

Qu’appelle-t-on « dérive génétique » ?

Du fait d’une absence de compétition sélective, alimentaire, sexuelle ou territoriale maintenant le caractère de l’espèce, il s’effectue une dérive génétique. Si elle ne modifie pas le code génétique, elle rend pourtant les espèces captives inaptes à retourner dans leur environnement naturel. A cela, s’ajoute un problème de consanguinité, malgré les politiques d’échanges d’animaux entre zoos.

Qu’est-ce que la stéréotypie, qui frappe les animaux enfermés ?

Ces comportements déviants sont la conséquence d’une incapacité pour l’animal d’exécuter une fonction habituelle. Les stéréotypies sont un comportement de substitution. Ainsi, on peut observer dans nombres de zoos, des ours, félins, loups ou éléphants répétant constamment « à vide » le même comportement : balancement, allers et retours, apathie, léchage compulsif, etc. La prochaine fois que vous visiterez un zoo, prêtez attention à ces phénomènes : ils sont majoritaires.

Les zoos jouent-ils un rôle pédagogique ?

Dans un pays où les enfants sont désormais incapables, pour la plupart, d’identifier la moindre des espèces locales, qu’elles soient volantes, rampantes ou à quatre pattes, cet argument pédagogique est utilisé par les enseignants, oubliant au passage les centaines d’espèces végétales et animales que l’enfant côtoie chaque jour sans les connaître.

Il est vrai qu’il n’est pas pareil de voir un animal « en vrai » que de le voir en vidéo. Mais voir un animal en vrai, c’est le voir dans son écosystème, c’est-à-dire dans son milieu, entouré des espèces de ce milieu, selon ses rythmes et ses comportements, ce qui n’est pas le cas dans un zoo.

Par exemple, qu’apprendra l’enfant face à un ours blanc dans une piscine de verre, une fausse banquise en béton, par 30 °C à l’ombre, mangeant de la viande préparée ? Face aux grands singes confinés derrière des parois de verre, sans arbre, sans herbe, parfois même sans leurs congénères ? Face à une otarie dressée à faire tourner un ballon sur son museau ? L’enfant ne verra qu’une image faussée de l’animal, car dépouillée de son « animalité ».

De plus, le mélange constant entre les espèces dans l’aménagement des zoos perturbe la vision géographique de l’enfant. Et les panneaux explicatifs n’y changent rien : ce qui retiendra l’attention de l’enfant, c’est avant tout ce qu’il verra et ressentira à proximité de l’animal. Une perception bien éloignée de la réalité.

Les zoos participent-ils à la conservation des espèces ?

Si les espèces sont en danger et disparaissent, c’est avant tout parce que l’homme les a décimées. Le travail de sauvegarde des espèces ne peut se faire que sur le terrain. Par conséquent, utiliser à des fins commerciales des animaux et prétendre que cela permet de sensibiliser l’opinion à la conservation des espèces, c’est faire un grand écart quelque peu osé. Imaginons un instant que l’on enferme des aborigènes ou des Indiens d’Amazonie pour que leur « spectacle » sensibilise l’Occident à leur disparition !

Dans notre société de consommation, voir un animal, c’est bien souvent vouloir le posséder (souvenons-nous des ravages qu’a entraîné le succès du film Le Monde de Némo sur la population de poissons-clown). L’homme ne peut s’arroger le rôle bien présomptueux de « conservateur des espèces », alors qu’il est le plus grand destructeur de la planète !

Enfin, la conservation des espèces ne saurait passer par la conservation d’un animal en tant qu’individu. De même, la préservation des animaux en voie de disparition ne saurait se faire au travers de la collection de quelques spécimens. Au mieux, cela représente un bel argument de vente.

Les réintroductions d’animaux captifs dans leur milieu naturel ne sont-elles pas un gage de ce travail de conservation ?

Au contraire, selon le International Zoo Year Book, forum mondial d’informations sur le rôle des zoos, les réintroductions illustrent assez bien l’échec de la politique dite de « conservation » des zoos. Un échec qui se décline en quatre constats :

  1. les espèces les plus vulnérables sont sous-représentées dans les zoos car elles sont moins « vendeuses » (les batraciens par exemple, extrêmement menacés) ;
  2. les espèces « stars » (tigres, éléphants, grands singes) ne font l’objet d’aucune mesure de réintroduction ;
  3. les espèces pour lesquelles quelques réintroductions ont réussi sont principalement des espèces domestiquées ou semi-domestiquées (le cheval de Przewalski, le cerf du Père David, l’oryx d’Arabie, le bison d’Europe, l’oie Néné d’Hawaï) ;
  4. la plupart des espèces sauvages effectivement réintroduites n’ont pas survécu. Par exemple, sur les 100 tamarins-lion (un singe d’Amérique du Sud) remis en liberté, on estime que 70 sont morts.

Ce bilan macabre résulte de l’impossibilité de la réintroduction d’espèces autrefois sauvages, ayant été au contact de l’homme, ayant vécu hors de son espace naturel, séparées des leurs donc incapables de se comporter comme elles auraient appris à le faire dans la nature.

Au total, moins d’une vingtaine d’espèces (la plupart semi-domestiques) ont été réintroduites par des structures adjacentes aux zoos. Car si certains zoos financent des programmes locaux de conservation, ils n’en sont ni les acteurs ni les commanditaires.

Que faire alors pour sauvegarder les espèces menacées ?

Si l’on veut réellement s’investir pour la sauvegarde des espèces, c’est en le faisant sur le terrain, au travers de programmes de réintroduction in situ, de protection des espaces, de mesures contre le braconnage et par un investissement pour une nouvelle considération de l’animal en tant qu’être à part entière et non en tant qu’objet au service de l’humain.

Les cinq libertés

L’Organisation mondiale de la santé animale retient cinq libertés comme standards minimaux applicables à la garde d’animaux :

  1. être épargné de la faim et de la soif (approvisionnement en eau et en nourriture) ;
  2. être épargné de l’inconfort physique (fourniture d’un environnement approprié) ;
  3. être épargné de la douleur, des blessures et de la détresse physique (par la prévention et la fourniture de soins sanitaires appropriés) ;
  4. être libre d’exprimer des modes normaux de comportement (fournir un espace approprié et des établissements convenables) ;
  5. être épargné de la peur et de la détresse morale (garantir que les conditions ne causent pas de souffrance mentale).

Ces cinq critères sont utilisés par Endcap , coalition européenne pour mettre fin à la captivité des animaux sauvages, pour évaluer le respect des directives européennes de bien-être dans les zoos de l’Union.