Gorille de zoos : un produit de consommation

Avec un ADN très proche de celui de l’humain, le gorille, comme les autres grands singes, ne bénéficie pas de plus de clémence de la part de l’homme. Il reste à l’état sauvage dans un état d’extinction alarmant et les zoos continuent de les enfermer.
Gorille – zoo de la Boissière du doré – 2010 par Ziha

Même proche génétiquement, le grand singe doit garder sa distance et se soumettre à un homme auto proclamé empereur omnipotent. A se demander si notre volonté d’enfermer les bêtes ne naîtrait pas d’une peur de perdre notre domination absolue sur le reste du monde.  Entre un discours bienveillant de conservation des espèces et des actes de destruction de celles qui restent, l’homme s’octroie une bonne conscience tout en soumettant la bête à son bon vouloir.

Les zoos sont de ce paradoxe. Enfermer en justifiant de leur bienveillance. S’il est vrai que les zoos sont contraints (c’est une obligation légale) de participer d’une manière ou d’une autre à des programmes de conservation, ils distillent néanmoins auprès du grand public l’idée selon laquelle l’animal n’est pas libre de décider de sa destinée, et c’est bien là le véritable problème.

Non seulement les zoos ne servent pas les animaux qu’ils enferment, mais ils desservent les espèces qui vivent encore à l’état sauvage, en réduisant l’animal à un produit de consommation. Il suffit de visiter quelques zoos pour comprendre que l’animal n’en est plus qu’un produit commercial.

Bienvenu au Gorilla’s camp !

Au zoo d’Amnéville, il vous faudra, tel un parc de loisir, suivre les panneaux vers la prochaine attraction. Bienvenu au Gorilla’s camp !  Sur fond de peinture de forêts humides et juchés sur quelques troncs d’arbres morts, des gorilles estampillés “espèces en danger” et bénéficiant d’un EEP (Programme Européen d’Elevage) survivent  comme ils peuvent. Aucun d’eux ne pourra rejoindre une quelconque forêt. Ils sont condamnés à devenir les représentants de leur espèce dans un musée vivant. Une triste galerie des ombres… dans un décor à 10 millions d’euros.

Le gorille Tatu, 3 ans, a fait les frais de ces décors artificiels au zoo de Prague en se pendant, en juillet dernier, “alors qu’il jouait dans un système de cordes installé au pavillon de gorilles“.

Le stress de l’animal captif

Une étude publiée en 2005, révèle que les gorilles deviennent agités et anxieux dans les zoos lors de la présence de visiteurs :

“Nous avons noté une augmentation très nette des comportements de relaxation et de repos, pendant les moments de la journée où les visiteurs étaient les moins nombreux. En revanche, aux heures de pointe, les gorilles manifestaient de toute évidence des attitudes révélant leur agitation, tels que des balancements incessants, des agressions dirigés contre d’autres membres du groupe, ou de l’auto-épouillage réitéré” a déclaré l’auteur de l’étude, Deborah L. Wells. (Source dauphinlibre et News in science).

Afin de répondre à ce stress induit par cette présence humaine en masse, des zoos diffusent désormais de la musique classique pour couvrir le bruit des visiteurs et ainsi calmer les grands singes.

Musique classique et décors de parcs à thème, on est bien loin du biotope propre à l’espèce, si loin des forêts d’Afrique de l’Ouest et de la quiétude qui y règne.  Lorsqu’il le peut, cet animal sociable et pacifique, quitte le décor…

Plusieurs évasions ont été révélées par la presse, mais même si celles-ci sont nombreuses, elles ne représentent que celles qui ont été possibles. Nous ne saurons jamais le nombre de gorilles qui quitteraient ces enclos artificiels s’ils le pouvaient….

Voici quelques exemples :

  • En mars 2012, Koga, un gorille mâle à dos argenté s’échappe de son enclos du Buffalo Zoo aux Etats-Unis après avoir blessé une employée (source CBS news).
  • En février 2012, 2 gorilles quittent leurs enclos du zoo de Kansas City, suite à une négligence des employés (source Kansascity.com).
  • En mars 2010, le gorille Tufani a réussi à quitter son enclos du zoo de Dallas (Etats-Unis) (source Dallas news)
  • En mai 2007, un gorille s’évade du zoo de Rotterdam et blesse 4 personnes (source BBC News)
  • En mars 2004, Jabari un gorille de 13 ans a été abattu après avoir quitté le zoo de Dallas (source US news)
  • En septembre 2003, Little Joe s’échappe du zoo du Franklin Park près de Chicago, blessant  2 personnes (source Boston.com)
  • En novembre 1998, Hercule, un gorille de 154 kg s’échappe de son enclos et blesse un des gardiens du zoo de Dallas (source Texnews)

Naissance n’est pas reproduction

Si nombres de gorilles étaient capturés à l’époque, aujourd’hui les gorilles présents dans les zoos sont pour la plupart nés en captivité. Nous rappelons à cette occasion qu’il ne faut pas confondre “naissance” et “reproduction” celle-ci,  impliquant que l’espèce peut se perpétuer par l’arrivée de nouveaux individus. Les naissances dans les zoos sont fréquentes, les reproductions non. Dans le cas des gorilles, les zoos sont confrontés au problème d’un excès de mâle et d’un manque de fertilité des femelles au point qu’il y a actuellement une surpopulation de mâles en captivité …   un comble lorsque l’on sait qu’ils resteront captifs !
Dans son discours de conservation, l’homme construit peu à peu une conserverie de gorilles des plaines devenues gorilles sans plaine :  des gorilles de zoos.

Des programmes oui mais…

Nous ne remettons pas en cause les programmes in situ (sur place en Afrique pour les gorilles), mais le fait que leur financement se fasse en partie via les zoos. Puisque c’est le public qui paie, il est dommageable que ceci se fasse au préalable par le biais d’une “consommation” d’un animal captif. Autant que les aides soient versées directement par des organisations ou par des dons de particuliers.

La progression de l’extinction des espèces et l’annihilation permanente des animaux tendent à créditer la thèse selon laquelle les zoos ont non seulement échoués mais participent de l’aggravation de la situation. Ce n’est pas en privant les gorilles de leurs plaines ou de leurs montagnes que nous les sauveront et c’est encore moins en les exposant comme des produits consommables (tu paies, tu peux voir) que nous éveillerons à un respect de ces proches cousins.

La conservation d’une espèce se fait dans  le respect de son espace et de ses besoins élémentaires.

Publié le: 
02/12/2012